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Photo du rédacteurAnouchka

Attendre

Dernière mise à jour : 4 oct. 2021





Attendre, que signifie attendre ? Samuel Beckett a parfaitement mis l’attente en scène, dans sa pièce de théâtre En attendant Godot. Wladimir et Estragon attendent Godot : un personnage supposé venir pour les sauver mais qui n’arrive jamais ! Le cercle vicieux de l’attente se resserre lorsqu’à la fin du deuxième et néanmoins dernier acte, le scénario du premier acte se répète : un jeune homme proclame l’arrivée imminente de Godot, pour le lendemain. Au moment où le rideau retombe, il ne reste que l’attente qui occupe toute la place.


Cette séquence de temps du confinement est une occasion inestimable de prendre conscience de la nécessité devivre dans l’ici et maintenant. De vivre chaque jour avec d’autant plus d’intensité que l’avenir est incertain. Au carpe diem, je préfère le carpe aeternitatem : au cœur de chaque journée réside une part d’éternité.

Sans être toujours dans l’attente d’un présumé sauveur, censé surgir pour nous sortir de l’ornière, nous avons toutes et tous la capacité d’être acteurs de notre vie et d’endosser notre propre costume de « sauveur ».


Dans l’attente, réside l’impatience, poison de notre société moderne. Exit l’imprévu. Tout est planifié. Codifié. Pourtant, dans l’attente, il y a les notions d’espoir, d’espérance ; toutes les deux indispensables à notre équilibre, car, comme le disait avec justesse Dostoïevski : « Vivre sans espoir, c’est cesser de vivre ».

Si nous évoquons l’impatience, nous ne pouvons faire abstraction de son contraire, la patience. Emmanuel Housset nous livre deux définitions de la patience ; elle peut être : « soit l’accomplissement de la volonté, soit la capacité à suspendre la volonté pour écouter le monde ». Cette période est une incitation au lâcher prise et à l’acceptation de ce que l’on ne peut pas changer. Cueillir la vie dans toute son ambiguïté, c’est décider de rester en vie. Nous sommes tous liés les uns aux autres ; or, s’il existe un partage universel, il réside dans la croyance en la vie.


Il me semble que notre société réduit le rôle de la patience à une « auto-affirmation du moi », à garder le cap coûte que coûte, même dans les expériences de vie les plus périlleuses. Pourtant, la ruine est un présent : une plongée en apnée au cœur des abysses de l’océan d’un destin brisé. Synonyme de changement, elle permet de renaître de ses cendres, tel le phénix. En outre, c’est dans l’adversité que l’on développe sa capacité à se montrer résilient.

En cette période de confinement, nous pouvons nous retrouver seuls, face à nous-mêmes et cela peut nous paraître difficile ; d’autant que cette situation s’accompagne d’une nécessité d’admettre que nous sommes des êtres imparfaits.

Ou bien nous devons composer avec un conjoint, une compagne, des enfants et le lieu de vie se transforme en vase clos, où l’atmosphère peut très vite devenir irrespirable. Je vous propose de repenser votre lieu de vie, d’en faire un cocon où il fera bon vivre et se sentir en sécurité. Vous pouvez, par exemple : allumer des bougies, écouter de la musique, prendre un bain, vous isoler dans une pièce quand cela est possible….


La journée doit être rythmée par une routine dont le choix vous appartient : pratiquer un peu de yoga ou quelques exercices d’assouplissement, méditer en pleine conscience, lire… Mais n’oubliez pas que vous pouvez également vous accorder le droit de ne rien faire, si votre corps le réclame. Vous avez aussi la possibilité d’instaurer des rituels comme : l’heure du thé vers 16 heures ou une pause douceur « infusion du soir », soit devant un film, soit en lisant un bon roman.

Enfin, il faut garder présent à l’esprit que ce temps de confinement est une incroyable opportunité de faire ce dont nous rêvions depuis toujours, mais que nous n’avons jamais eu le loisir de réaliser, justement par manque de temps.

Vous pourriez prendre une feuille de papier ou un joli carnet et écrire ; en commençant par : le confinement m’inspire… Ou bien, en ce moment, je ressens…. Il s’agira de laisser courir votre plume sur la page blanche, sans réfléchir : c’est-à-dire de pratiquer l’écriture automatique, sans poser votre stylo. Puis, de vous relire. Cet exercice est un procédé reconnu pour ses vertus thérapeutiques et libératrices de bon nombre de tensions et d’inhibitions. Et même si le quotidien vous semble parfois, ou même souvent, d’un ennui mortel, songez qu’il est le marqueur du temps : un ami incontournable qui nous évite de sombrer dans la folie.


En dépit du fait que vous pouvez avoir le sentiment que le temps ne passe pas ou que vous ne reprendrez jamais le court d’une vie normale, la patience s’inscrit dans la temporalité. En outre, on ne peut penser la patience sans rattacher cette notion à l’action de tendre vers soi, de se connaître soi-même, de se réconcilier avec soi.

Pour conclure, je vous invite à méditer sur cette définition du concept de patience décrit par le philosophe danois Sören Kierkegaard comme « une temporalité de soi authentique ».



Bibliographie


Housset, E. (2008). La douceur de la patience. Revue éthique et de théologie morale, 250, 33-38.




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